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Articles

Les Music Halls du 10e - le 12/01/2017 @ 00:12 par HV10

"Moi, j'aime les Music-Halls ... du 10e" *

Aujourd'hui où renait une grande salle du Music-Hall du 10e : La Scala grâce au couple Mélanie et Frédéric Biessy qui l'ouvriront en 2018, nous  accompagnons notre écrit de l'article intitulé : " La Scala, saga d’une salle aux mille visages" paru dans le Monde (23/12/2016) sous la plume de Brigitte Salino qui fait une mise à jour de l'histoire et de l'état d'avancement des travaux pour la renaissance de ce théâtre, voir ici  et la fête du 20 février pour l'inauguration des travaux avec la présentation de la maquette ici.

" Moi j'aime les Music-Halls ... du 10e " pourrait-on dire en parodiant Charles Trénet et sa célèbre chanson. Quand les feux de l'actualité, et non ceux de la rampe, éclairèrent hélas la triste histoire de La Scala, il nous a semblé bon de faire un petit tour de scène vers ces lieux mémorables du 10e qui en firent "l'arrondissement de la musique". En effet, tout un monde musical vivait autour du quartier des Portes : chanteurs des rues ou de scènes, compositeurs, nombreux éditeurs et marchands de partitions musicales, imprésarios à la recherche de la vedette qui ferait flamber les planches. De ce passé musical, il reste aujourd'hui quelques plaques commémoratives sur des immeubles, un ou deux noms de rues, le seul témoin qui était encore en place il y a quelques années a aujourd'hui disparu : c'était la maison de musique de Martin Cayla dont l'accordéon nostalgique résonnait encore rue du Faubourg-St-Martin - pour qui savait l'entendre - au milieu des magasins de confection enfantine.

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La Scala © Collection Jeannine Christophe

L'histoire commence au début du 19e siècle avec les cafés chantants, "les guinguettes des bords de boulevards", où l'on se rassasiait autant de chansons que de repas et de boissons ; au Second Empire la mode "de boire en chantant" continua dans les cafés-concerts, à l'appellation populairement syncopée en "Caf'conc". Au milieu de la Belle Époque, le Caf'conc si parigot s'anglicisa en "Music-hall" ; sa fonction changea avec son nom "hall (salle) à musique" : on ne consommait plus autour d'une table, mais on s'installait confortablement dans des fauteuils rouges, disposés en rangées, pour écouter le tour de chant d'une vedette et regarder un spectacle de variétés : "l'attraction" qui faisait monter sur les planches aussi bien le jongleur de cirque, le prestidigitateur, le comique troupier que la danseuse aux longues jambes, tout juste vêtue d'un pagne de bananes ou d'un truc en plumes : la revue de music-hall était née ! elle s'enrichit très vite de troupes de danseurs et de chanteurs qui firent la gloire des revues à grand spectacle : "le show" des plus célèbres Music-halls parisiens, là réside l'ambiguïté du terme "music-hall" désignant à la fois un établissement et un genre de spectacles.
Mais passons en revue les trois plus renommés de la vingtaine de Caf'conc et Music-halls du 10e : il y a ceux qui ont totalement disparu, ceux qui ont été transformés, souvent en salles de cinéma, enfin ceux qui sont en danger de disparaître ou d'être recyclé en ? …

L'Eldorado

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L'Eldorado © Collection Jeannine Christophe

Le premier de notre histoire est un café chantant au nom rutilant d'or " l'Eldorado", familièrement appelé "l'Eldo", installé dès 1858 rue du Faubourg-Saint-Martin, son succès le fit vite déménager dans une salle plus grande, 4 boulevard de Strasbourg ; là pour la première fois, les artistes eurent l'autorisation de se produire costumés, travestis, évoluant et parlant (et non mimant) au milieu d'un véritable décor de théâtre. C'est par l'Eldo que se fit officiellement la transformation des salles de café-concert en salles de "théâtre-Music-hall". Devenu l'établissement le plus populaire de Paris, il était le passage obligé d'un interprète d'un tour de chant pour être sacré "vedette", plus tard on dira "étoile" puis "star". C'est à l'Eldo que se produisirent des chanteurs qui connurent la grande gloire à leur époque mais dont les noms pour les générations d'aujourd'hui n'évoquent plus rien : Thérésa, Paulus, Polaire, et ceux un peu plus passés à la postérité comme Dranem et son célèbre "Ah ! les p'tits pois", Mistinguett et son "Je suis née dans l'faubourg-Saint-D'nis", Maurice Chevalier et son "Paname" et bien d'autres encore. En 1932 l'Eldo ferma définitivement, sa façade puis sa salle tombèrent sous les coups de pioches. On y construisit une banque dans les années 1935, puis après des occupations diverses, une nouvelle salle de spectacle ouvrit sur ce lieu-même qui avait su garder son âme, aujourd'hui sous le nom de "Comedia", il vibre à nouveau sous les applaudissements du public, c'est un heureux retour aux sources.

 La Scala

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Yvette Guilbert  et Jeanne Bloch à la Scala,
affiche de Ludovic Galice (
© Coll. J. Christophe)

Au 13, boulevard de Strasbourg était une auberge guinguette devenue en 1868 "café-chantant" sous le nom de "Concert du Cheval-Blanc". Face au succès de l'Eldo, le directeur du Cheval-Blanc transforma en 1876 son établissement en music-hall, lui voulant un avenir aussi prestigieux que l'Opéra de Milan, il le baptisa "La Scala" ; mais à défaut d'opéra, il en fit le temple de l'opérette et du tour de chant et surtout la grande rivale de l'Eldo, il lui arracha ses vedettes ; là brillèrent Fragson, Yvette Guilbert et bien d'autres. Transformé un temps en théâtre consacré aux vaudevilles de Feydeau, il retrouva en 1934 son panache de music-hall avec le tour de chant de Damia, il devint ensuite cinéma, puis comme bien des salles du boulevard, il fut employé au service du 7e art pornographique avant d'être racheté, à l'insu de quelques uns mais surtout à l'inattention de beaucoup d'autres, par une secte religieuse, qui si on l'avait laissé faire, aurait fait retentir dans sa grande salle les chants de son gourou et produit en attraction des tours de magie guérisseuse et de passe-passe de l'argent de ses fidèles. Aujourd'hui, des travaux sur la façade et à l'intérieur du site annoncent qu'un théâtre du nom de La Scala va rouvrir bientôt vers 2018, après 16 ans de fermeture forcée pour que la secte ne sévisse pas !

Le Concert Mayol

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Le Concert Mayol © Collection Jeannine Christophe

Évoquons enfin un lieu qui resta longtemps en activité musicale "Le concert Mayol" au 37, rue du Faubourg-Saint-Denis avec l'entrée principale au 10, rue de l'Echiquier. En 1730, sur un terrain occupé jadis par le couvent des Filles-Dieu s'installa un café ; quand on lui dressa une estrade en 1867, il devint café-chantant et s'appela alors "Concert Parisien" ; c'est là qu'Yvette Guilbert, allant comme bien d'autres au plus offrant des Caf'conc, y conduisit une revue qui fit sa gloire et celle des peintres qui la croquèrent. En 1909, un débutant, Félix Mayol, achèta l'établissement, l'audace souriant aux jeunes, il n'hésita pas à lui donner son nom et ouvrit l'entrée principale rue de l'Echiquier. Il aménagea l'entrée des artistes dans un immeuble mitoyen dont la porte cochère ornée de deux angelots était comme un clin d'œil au lointain passé religieux du lieu, que ne profanèrent pas les revues à grand spectacle qui s'y succèdèrent sous la houlette de divers directeurs dont Henri Varna. Là se produisirent des grands noms du Music-hall : Marie Dubas, Lucienne Boyer, Fernandel, Tino Rossi, etc. Il redevint Music-hall d'un genre spécialisé dans les années d'après guerre en se consacrant au nu "esthétique" qui cachait sous cette appellation pudique rien d'autre qu'un strip-tease. Le Concert Mayol eut ensuite, comme les autres Music-halls, diverses destinées : il fut longtemps magasin en libre-service alimentaire, école de style Pigier, puis entreprise d'informatique, enfin un panneau "À vendre" fut apposé avec un certain humour entre les mains des deux angelots de la porte. Aujourd'hui le Mayol est devenu un centre culturel et cultuel asiatique.
 

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Fronton du Concert Mayol © Photo J. Christophe


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Affiche d'Adrien Barrère, 1915 (TDR)

Là se termine notre tournée des grands ducs des trois plus célèbres Music-halls du 10e, mais laissons Mistinguett conclure "Le music-hall : c'est des femmes, c'est des plumes, c'est des gens. C'est rien et c'est tout, mais tout c'est la vie !".

Jeannine Christophe

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* Article paru dans "La Gazette du Canal", n° 25, été 2000, réactualisé en 2013, puis en 2017.